SF, fantasy, et régime politique

Une réflexion que je me fais, et qui n'a rien à voir avec les hasards actuels du calendrier (croix de bois...), il me semble que dans la plupart des bouquins de sf, le régime politique qui est exposé ou qui sert de décor à l'intrigue est un régime monarchiste ou dictatorial. Cela, dans le cadre de la création d'un univers. évidemment, c'est encore plus vrai pour la fantasy (mais là, mes références sont tellement succintes que, hein).

On ne compte plus les empires intergallactiques et leurs succédanés. Et, lorsque l'auteur fait oeuvre de démocratie, celle-ci est noyautée par les dérives et faiblesses propres à une démocratie (l'aveuglement béat des masses, la manipulation et l'accaparement du pouvoir par un petit groupe, ou un comportement hégémonique). Pour exemple, l'impérialisme athénien suite aux guerres médiques (oups, là je fais un flash back un peu before jesus christ totalement hors sujet). Pour exemple donc, la Culture de Banks, régime de libertés, régime rouleau compresseur aussi, la structure, dont j'ai présentement oublié la dénomination, qui a précédé l'Ekumen de Le Guin.

Quant à la fantasy. Ah, la fantasy est dominée par les royautés.

Conclusion : pour un genre qui se veut interroger le futur, beaucoup de systèmes politiques qui sont autant de retour en arrière. Avez-vous une idée du pourquoi de cette prolifération de monarchies et de régimes autoritaires ?

Réponse A : Les écrivains sont des tyrans refoulés qui subliment leur sous-moi daseinvergesteltgatztrique.

Réponse B : Seuls les scénars basés sur les tourmentes politico-sociales se vendent bien. Les grands défis humanitaires ou scientifiques un peu moins.

Réponse C : Le peuple réclame des tyrans, les grenouilles veulent un roi, et l'écrivain, à qui rien de l'humain n'est étranger, ne peut déroger à cette loi atavique.

Je vais encore me faire taper dessus, à faire le provocateur...

Je raisonnais plus en termes de simplicité. Un monde où le pouvoir a une assise forte, permet d'éviter le flou artistique des régimes démocratiques. Les choses et les gens sont bien mieux rangés pourrait-on dire.

Après, en terme d'enjeux scénaristiques, il est certain qu'un empire pourri permettra plus facilement l'émergence d'un gentil groupe de rebelles. Rebelles, mais avec l'étendard de la justice flottant en pavillon (euh, pour le coup ça fait guerre des étoiles).

Et pourtant, les pratiques de la démocratie, ça peut être assez agréables à démonter, comme Spinrad dans La grande guerre des Bleus et des Roses.

Ou dans Jack Barron et l'éternité. Cela dit, vda, je te recommande Les dépossédés, de Le Guin. Et puis ce que tu dis me semble s'appliquer facilement au space op', mais dès que tu vises un sous-genre comme le post ap', ou l'uchronie, ou les jeux avec le temps, là ça le fait plus du tout !

En ce qui concerne les régimes politiques dans la science-fiction, il me semble qu'il y a autant d'exemples différents que d'auteurs.
Si dans une vaste majorité des cas comme le souligne fort justement Lisbeï le space opera foisonne d'empires stellaires et autres artefacts politiques du même genre, ce n'est pas une obligation.
De nombreux romans de Jack Vance par exemple mettent en scène des régimes politiques centralisés comme la série des Alastor, sans toutefois que ce régime puisse être qualifié d'empire ou de monarchie. Il est vrai qu'un empire stellaire offre de nombreuses opportunités scénaristiques, mais ce n'est pas la seule raison pour laquelle ce système politique pourrait être mis en évidence. Si l'on pense en termes de "logique interne" ou de "plausabilité", il est plus simple d'avoir recourt à un régime politique centralisé.
Le choix de Lisbeï de citer LeGuin dans les Dépossédés est très pertinent, car dans ce cas nous avons un système "utopique". Mais ce système ne s'applique si mes souvenirs sont bons qu'à une seule planète, ou peut-être un nombre restreint. Clairement il me semble difficile d'imaginer un grand ensemble, disons à l'échelle de plusieurs systèmes stellaires, qui soit du même genre que celui de LeGuin et qui soit tout à la fois gérable par un auteur et réaliste.

Dans la fantasy les monarchies et empires fleurissent il est vrai, mais il me semble que c'est inhérent au genre. La majorité des oeuvres de fantasy sont en effet une recréation d'un moyen-âge idéalisé et tout naturellement les régimes politiques s'inspirent de cette période. Mais, et c'est là que la différence se fait avec la réalité historique, c'est que le plus souvent les auteurs n'ont pas saisi l'importance du système féodal quand bien même ils en connaissent l'existence. En fait, il ne font que retranscrire le monde contemporain en y ajoutant une louche "historique" et grossissent le trait à l'envie. Pour s'en persuader il suffira de voir que les auteurs de fantasy considèrent leurs royaumes comme des nations entières, des entités compactes et homogènes alors que dans la réalité historique ce ne fût le cas que très tard, et très rarement durant le Moyen-âge.

		Citation : structure, dont j'ai présentement oublié la dénomination, qui a précédé l'Ekumen de Le Guin.

League of worlds.

Il faut lire Sylvie Denis.

Gnéé ? Je plussoie, Le Gaidol, bien sûr, mais dans Haute Ecole il s'agit bien d'une monarchie, non ? Si tu parles de La saison des singes, c'est vrai qu'il s'agit d'une entité lâche, d'où aussi la ressemblance avec la Culture de Banks. Tiens, d'ailleurs, un autre exemple de non-monarchie.

On ne peut pas vraiment parler d'utopie à propos des Dépossédés. Dans l'oeuvre de Le Guin, la Ligue de tous les Mondes, ensuite remplacée par l'Ekumen, rassemble de façon lâche également des planètes dont certaines sont des monarchies (Gethen, par ex) et d'autres non.

Question sérieuse: Y a-t-il en SF des exemples d'anarchisme qui fonctionne? Pas une utopie joyeuse, hein, mais un monde où les gens sont suffisamment responsables, en général, pour prévenir l'émergence d'autorités maintenues par la menace ou la contrainte - l'apparition de psychopathes dominateurs ou manipulateurs, et la lutte contre eux, donnant éventuellement la matière du scénario.

Ben, Les Dépossédés, qualifié par son auteure d'"utopie ambiguë" (il ne me semble pas qu'il ait été chroniqué sur CSF, je vais vérifier. Si je peux me permettre : http://climaginaire.joueb.com/news/3633.shtml)... Sinon, je ne vois pas, là, pour l'instant...

Edit : Honte à moi, pardon, solaris, la chronique existe bien ici : http://www.culture-sf.com/forum/chroniques/forum2.php?num=334

Merci Lisbei, ça m'était passé par-dessus la tête. Maudit sois-je, je ne connais que Terremer de Le Guin. ça semble intéressant. Est-ce que les étapes de l'élaboration de cette anarchie sont décrites, ou du moins évoquées en flashback?