Cadavres exquis
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Monsieur Clers
un cadavre exquis proposé par JC

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JCFragonE-Traym


Monsieur Clers

Chapitre 3 proposé par E-Traym
Ce texte a été déposé le 23/10/2006


     A son âge, de pareilles aventures risquaient de lui coûter bien plus que prévu.
     Certes les cures de rajeunissement permettaient une régénérescence des cellules mais les organes eux, étaient fatigués. Et le cerveau lui, se sentait las.
     Monsieur Clers haïssait le désert au moins autant qu'il haïssait la vieillesse. Il était prêt à bien des sacrifices mais l'idée de l'exposition de son vieux corps au soleil brûlant du désert le terrifiait et le ramenait à une bien triste réalité : il avait 123 ans et peur de mourir.
Quelle horrible chaleur !

     A quelques dizaines de mètres de là, dehors, des touaregs discutaient âprement dans les rafales de poussière. L'un d'eux s'approcha de M Clers qui gesticulait, la tête enfouie sous sa veste à l'abri des rayons solaires.
     «Bonjour Professeur Clers ! Vous devriez économiser vos mouvements jusqu'à la navette ! Vous allez finir par suer toutes vos belles cellules neuves ! Ce serait dommage !
- Fichez-moi la paix jeune imbécile ! Portez-moi jusqu'à la navette au lieu de me faire la leçon ! Je pourrais être votre arrière-grand-père et vous me devez le respect : je suis le Professeur Clers et je dois me rendre au spatioport. Est-ce vous le chauffeur de cette navette ?
- Nous, les Touaregs, ne sommes jamais pressés. L'atmosphère est à l'optimisme, ces jours-ci, à Tamanrasset. Grâce aux pluies de ce printemps, le désert s'est couvert de touffes de verdure et de fleurs. Pour une fois, les troupeaux ont eu de quoi se nourrir. Dans les campements touaregs comme sur les marchés de la ville, on trouve du lait, du beurre et du fromage de chèvre en abondance. Suivez-moi dans la navette et vous dégusterez une tartine de beurre des chèvres du Hoggar pendant que je vous conduirai jusqu'au spatioport. Le voyage ne durera que quelques heures, tout au plus. Je m'appelle Zounga et j'ai ordre de ne pas vous lâcher d'une semelle, M Clers... Vous et votre dwir !
- Une tartine ? Quelques heures ? Insolent ! Je suppose que je n'ai guère le choix ?
- Non M Clers, vous n'avez plus aucun choix... Et il n'est pas question que je vous porte !»

     Les deux hommes se dirigèrent vers la navette, l'un souriant et l'autre maugréant. Zounga ouvrit l'unique porte arrière du véhicule et pria le professeur de s'installer dans un des sièges.
     La cabine de la navette était de forme ovoïdale et son volume était d'environ 60 mètres cube. De confortables fauteuils étaient disposés autour d'une table transparente sur laquelle des galettes parfumées au citron débordaient d'un plat de métal cuivré.
     M. Clers avait faim et soif et ne se fit pas prier deux fois de s'installer au plus près de ces fameuses galettes. «Ce n'est pas à 123 ans que je vais cesser d'être gourmand !» se dit-il.
     «Notre navette se déplace rapidement dans le désert et nous serons au spatioport d'ici 2 heures et demi environ. Nous pourrions nous y rendre beaucoup plus rapidement mais nous allons faire un crochet par la montagne : Ewanzeg vient avec nous.» déclara Zounga.
     Le professeur Clers hocha la tête et lui répondit avec un calme relatif et retrouvé grâce à l'ambiance fraîche de la cabine et à l'odeur citronnée que diffusaient les galettes :
     «Ewanzeg ? Soit ! J'ose espérer obtenir des explicitations sur tous ces mystères cher Zounga !
- Votre esprit M. Clers a trop vaqué ces dernières décennies à la futilité. Vous œuvrez au CHAT depuis si longtemps déjà... La curiosité ne semble pas faire partie de vos qualités premières... C'est étrange : vous avez des clés dont vous ne vous servez pas et détenez les réponses aux questions que vous vous posez depuis toujours. Je pense qu'Ewanzeg vous éclairera...
- Assez ! Taisez-vous ! Je ne comprends rien à votre discours ! J'ai simplement hâte d'en terminer avec cette histoire. Je maudis ce jour ou ce prétendu représentant m'a proposé cette galère et ce... ce DWIR !!!
- Bien Monsieur, je me tais, répondit Zounga en souriant. Mais vous pourriez tout de même terminer de déballer votre colis...
- Je souhaite juste m'en débarrasser rapidement et obtenir la meilleure compensation !
- Vous n'êtes décidément pas curieux professeur. Surprenant ! Réellement surprenant !»

     Zounga prit place aux commandes de la navette et démarra les moteurs magnétiques. L'engin fonctionnait comme un aimant : un champ magnétique était généré à l'avant de l'appareil tandis qu'un autre le repoussait de la surface du sol. Le système conférait à la machine un confort optimal et une douceur de voyage incomparable.
     La navette siffla et Zounga dicta les coordonnées de destination à l'ordinateur de bord qui choisirait le meilleur itinéraire en fonction de la cartographie.
     M. Clers était décontenancé, perdu. Jamais il n'avait vécu pareille situation.
     Il observa son colis et posa le petit cube sur la table. Lentement, il retira le tissu qui le recouvrait et détailla l'objet. Il ne s'agissait pas d'un dwir classique, ordinaire, en alliage blindé. Non, celui-ci semblait fait d'or pur et c'est ce qui expliquait au premier abord son poids excessif.
     M. Clers allait relever sa manche quand Zounga l'interpella :
     «C'est inutile M. Clers, vous n'arriverez pas à le lire.
- Vous m'agacez Zounga... Cela fait seulement une dizaine de minutes que je vous connais et vous m'agacez terriblement.
- Vous vous habituerez professeur, vous vous habituerez...
- Que savez-vous à propos de ce dwir ?
- J'en sais suffisamment... Mais c'est à Ewanzeg de vous éclairer à ce sujet... Il me semble que vous devenez curieux M. Clers... J'apprécie ce mieux... Allez Professeur, prenez une galette, c'est Khadidja mon épouse qui les a préparées spécialement à votre attention. Avez-vous soif ? Je peux vous préparer un thé si vous le désirez.
- Merci. J'attendrai votre «Ewanzeg» pour me sustenter en sa compagnie à la condition que ce ne soit pas trop long... Et puis non finalement. Servez-moi donc un thé. Je pressens que vous le préparez merveilleusement bien !
- Très bien. Admirez le paysage en attendant...»

     M. Clers reposa le dwir sur la table et l'enveloppa à nouveau de son tissu brun.
     Non, M. Clers n'était pas curieux. Il était extrêmement, terriblement, immensément curieux ! Mais il était surtout très patient, et sa curiosité avait toujours été récompensée par la patience. Ce n'était pas à son âge qu'il allait changer...
     Au travers des baies vitrées de la navette, le paysage désertique défilait inlassablement, parsemé ça et là de touffes d'herbes et de fleurs. M. Clers s'écria soudain :
     «Et ma tartine de beurre de chèvres ?
- Ewanzeg nous rapportera le beurre... Soyez donc patient...» répondit Zounga en souriant.
     Et, pour la première fois depuis le début de cette incroyable journée, M. Clers partit d'un grand éclat de rire tonitruant et communicatif.
     Puis, sa gourmandise prit le dessus et il avala goulûment trois galettes qu'il trouva fort délicieuses.
     «Vous féliciterez votre épouse Zounga, ces galettes sont un pur régal !
- Mais vous la féliciterez vous-même Professeur... Sachez juste qu'elles ont d'autres vertus que leur bon goût...» lui répondit Zounga.
- Pardon ?
- Khadidja vous expliquera. Nous arrivons bientôt au village d'Ewanzeg. Un conseil M. Clers, ne l'assaillez pas de questions à son arrivée dans la navette. Sachez être patient... Les réponses viendront. Et puis, la patience finit toujours par récompenser la curiosité, n'est-il pas M. Clers ?
- Vous me surprenez Zounga !
- Mais vous aussi M. Clers, vous aussi. Et vous n'avez pas idée à quel point !»

     La navette ralentissait au-dessus d'un village juché sur un piton rocheux situé à presque 3000 mètres d'altitude. Elle se posa sur une énorme roche rectangulaire qui semblait léviter sur l'horizon.
     A quelques mètres en contrebas, Ewanzeg, le chef de la cité du Hoggar attendait patiemment. Il était vêtu d'une djellaba blanche et de longs cheveux blancs flottaient dans les airs autour de lui.
     Il s'avança. Zounga ouvrit la porte de la navette et descendit à sa rencontre.
     Ils s 'embrassèrent en se serrant l'un contre l'autre avant de revenir dans le véhicule.
     Le chef de la cité était un vieillard au regard vif, pétillant et à l'allure allègre d'un jeune homme ce qui contrastait avec le nombre impressionnant de rides qui parcourait son visage.
     Il inspirait une grande confiance, la sagesse, et l'on devinait à travers ce personnage un savoir immense.
     M. Clers s'apprêtait à saluer Ewanzeg avec un certain respect protocolaire. Il pressentait l'importance de cet homme et savait que pour obtenir les réponses aux questions brûlantes qu'il se posait, il se devait d'être irréprochable.
     «Salut Clers ! La pêche ? Tiens Zounga, mets le beurre au frais !» s'exclama Ewanzeg.
     Déstabilisé, M. Clers ne savait comment répondre et décocha un hasardeux : « Euh... Bon... bonjour Ewanzeg, je suis très honoré de...
- Allons allons Clers» coupa Ewanzeg «Trêve de bavardages inutiles ! Asseyons-nous et partons au spatioport ! Les vieillards n'ont pas de temps à perdre ! N'est-ce pas Zounga ? Toi mon cher Clers, tu es «jeune», tu as la vie devant toi, même si tu ne le vois pas ! Tu es aveuglé... Je te rendrai la vue Clers ! Et puis, cesse donc de te faire du souci pour Annie, tu la reverras très bientôt. Elle est en sécurité avec Khadidja.»
     La navette repartit en sifflant en direction du spatioport d'Europafrique et en chemin, Ewanzeg parla peu.
     Il montra simplement par les baies vitrées de l'appareil le campement dans lequel il était né quelques centaines d'années plus tôt, un jour d'octobre 1924...
     M. Clers avec ses 123 ans, se sentit soudain tout fringant.


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JCFragonE-Traym

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