Cadavres exquis
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Monsieur Clers
un cadavre exquis proposé par JC

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JCFragonE-Traym


Monsieur Clers

Chapitre 1 proposé par JC
Ce texte a été déposé le 04/12/2005


     C'était une belle journée. La brume n'était pas trop acide et on pouvait distinguer la silhouette des passants jusqu'à trente mètres de distance. Des enfants jouaient dans la rue vêtus d'une simple combinaison-bulle et le soleil donnait une agréable blancheur aux nuages habituellement gris. Tout indiquait la fin du printemps et de ses pluies corrosives.
     D'ici deux ou trois semaines la température grimperait d'une dizaine de degrés et, avec un peu de chance, le ciel apparaîtrait ici et là sous forme de petites tâches bleues. Tout le monde était content, sauf bien sûr Monsieur Clers.
     Au fil des années, l'épaisseur de la couche d'ozone s'était considérablement amoindrie et les ultraviolets étaient devenus de plus en plus agressifs. Un été sans protection vous faisait vieillir de deux ans et c'était là une conséquence climatique que Monsieur Clers refusait d'accepter.
     Agé de cent vingt-trois ans, il dépensait déjà assez d'argent pour maintenir son corps dans une relative jeunesse : les cures de régénérations coûtaient excessivement cher et son pécule, à l'origine confortable, s'était amenuisé au fil de ses rajeunissements.
«Le soleil est un luxe que mes cellules ne peuvent plus se permettre» aimait-il à répéter.
Il en était déjà à son cinquième traitement et, à défaut de trouver les fonds nécessaires, il allait devoir laisser la vieillesse remplir son triste office. Il était hors de question de laisser une vulgaire étoile accélérer sa dégénérescence.
«Protec-Sun : Et votre peau restera jeune»
«UV-Killer : Ne laissez pas vos cellules se faire tuer»
«OZON : Vos ancêtres l'ont gaspillé, nous l'avons remplacé»

     Ce n'était pas les produits qui manquaient mais l'expérience montrait qu'aucune de ces protections n'était pleinement efficace. En fait, seul un exoderme polarisable pourrait stopper l'ensemble des radiations solaires, mais avec les chaleurs estivales frôlant les 40 degrés à l'ombre, il se voyait mal supporter ce genre de tenue...
Pour toutes ces raisons, Monsieur Clers avait définitivement pris l'été en grippe.
     C'est donc en maugréant qu'il pénétra dans la salle des archives du C.H.A.T, facétieux acronyme du «Catalogue Hétéroclite des Avancées Technologiques». Il passa sans un regard devant son assistante, Annie, qui l'accueillit néanmoins avec son entrain coutumier.
     - Bonjour professeur.
Il se retourna, visiblement agacé d'être interrompu dans son élan.
     - C'est vous qui le dites !
Annie se demanda un instant comment interpréter cette réponse. Humour incisif ou aigreur matinale ? Le regard torve de son patron la fit pencher pour la deuxième solution. Elle tenta d'alléger l'atmosphère.
     - Vos vacances se sont bien passées ?
     - Non ! D'ailleurs si vous voulez mon avis, les congés obligatoires sont une aberration. Me forcer au repos ne donne pas plus de travail aux autres.
Annie n'insista pas, il y a des jours comme celui là où c'était inutile.
     - Bon, assez bavardé. Rien de particulier durant mon absence ?
     - Non, la routine : trois chercheurs nous ont adressé une demande d'accès aux dossiers de classe C, une plainte pour usage abusif du nom " chat " a été déposée par une descendante de Schrödinger et le ministère de la défense menace de nous faire fermer si nous rendons publique les archives de 2037.
     Annie était la plus jeune employée du C.H.A.T. Armée de ses 23 ans et d'un charmant sourire, elle avait su faire sa place à force de travail et de bonne humeur.
Il faut dire qu'en cette période pour le moins difficile, elle était particulièrement chanceuse. Alors que la moyenne de temps de travail hebdomadaire ne dépassait guère la quinzaine d'heures, elle en passait presque le double aux archives et touchait un salaire en conséquence.
Certains, parmi les employés du C.H.A.T, attribuaient cela à sa parenté avec Elli Jark, directeur de la clinique Re-Génération, mais ce n'étaient que des mauvaises langues. Monsieur Clers n'aurait jamais confié le poste d'assistante à une écervelée et Annie s'appliquait à mériter la confiance qu'il lui accordait en remplissant sa tâche avec une rigueur et une efficacité que nul piston ne pourrait remplacer.
En fait, la véritable raison de ce privilège était l'estime mutuelle qui les liait tout deux et qui n'avait fait que croître au cours des mois. Si Monsieur Clers appréciait le travail et la fraîcheur de caractère de son assistante, Annie appréciait, quant à elle, la simplicité et la modestie du professeur. Il était certes un peu lunatique mais Annie tolérait d'égale façon ses diverses facettes. Elle acceptait ses élans paternalistes des bons jours de la même manière que son mutisme des mauvais et semblait en tirer une moyenne relativement honorable. De plus, malgré sa jeune apparence, Monsieur Clers lui rappelait son grand-père, mort de vieillesse trois ans auparavant. Question de génération sans doute.
     - Bien. Je vais dans mon bureau. Filtrez mes appels, je ne veux pas être dérangé.
Aujourd'hui, de toute évidence, était un mauvais jour.
     - Bien professeur. Au fait, vous avez reçu un colis hier.
Un grognement bourru indiqua le peu d'intérêt que cet évènement postal suscitait chez lui. Annie poursuivit néanmoins :
     - Il n'est pas très gros mais joliment emballé. Je ne sais pas si c'est important, mais comme il portait la mention Confidentiel j'ai préféré ne pas y toucher.
N'obtenant aucune réponse, Annie lui précisa que le colis se trouvait sur son bureau, puis elle s'éclipsa.
     Posé devant son ordinateur, un paquet de taille modeste attendait effectivement Monsieur Clers. Il était recouvert d'un simili-papier de bonne facture en travers duquel un CONFIDENTIEL rouge vif s'étalait ostensiblement. Sur un des cotés, l'adresse du C.H.A.T et le nom du professeur étaient inscrits à la main. L'écriture était belle et régulière, sans doute féminine. La curiosité atténuant peu à peu son acrimonie, Monsieur Clers ouvrit le colis. Ce qu'il découvrit chassa son amertume et éclaira son regard d'une lueur de convoitise. Finalement une sixième cure n'était pas totalement exclue. Il fallait juste qu'il joue serré...


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