Plaidoyer pour une mal-aimée

Après la fougueuse insistance d'Olivier, j'avais vraiment honte de traîner à ce point les pieds sur les textes courts. Donc j'ai pris à la bibliothèque un énorme pavé (1250 pages, excusez du peu !) intitulé Nouvelles des siècles futurs. C'est une antho de Goimard et Guiot, chez Omnibus. Bon, je dois bien reconnaître qu'il s'y trouve des textes superbes, dont Le point de vue de la cafetière, superbe nouvelle de Berthelot que j'ignorais jusqu'à hier. Mais il y a bien d'autres bijoux à découvrir, et je vous le recommande.

Dans les autres bijoux, une nouvelle de Roland Wagner Fragment du livre de la Mer. La majuscule me vient directement du Tyranael de Vonarburg, où se trouve, dans le 1er tome, la phrase Il ne faut pas avoir peur de la Mer. La Mer est une porte. L'écho m'a stupéfiée !

La nouvelle, comment faire pour l'aimer seule ? Elle qui est presque toujours accompagnée ? En effet, seules les novellas peuvent se permettre d'être éditées seules, comme dans la bienvenue collection du Rocher. La nouvelle, souvent regroupée en recueil, ne peut être vendue chez de grands éditeurs toute seule, elle est trop maigre pour cela. Historiquement, et généralement, elle a sa meilleure place dans la revue. Mais aujourd'hui, combien avons-nous de magazines professionnels dédiés à la SF ou à l'imaginaire en général ? Et surtout, ils sont majoritairement trimestriels. Et aussi pour chercher une nouvelle particulière, les archives d'une revue, ce n'est pas ce qui est du plus commode.

Heureusement qu'il y a les fanzines qui publient majoritairement des nouvelles. Mais là encore, reste-t-on longtemps dans le fanzinat ? La trouvaille de fanzines, en temps normal, c'est déjà hypothétique, mais en archive, c'est encore plus la galère.

Les nouvelles regroupées en recueil, elles peuvent avoir la chance d'être très bien accompagné, le tout formant une bonne unité. Mais dans ce cas, on se rapproche du roman, en tout cas, cela n'est plus le même plaisir. Les recueils généraux, sans thème particulier, c'est bien, mais nous n'avons pas le choix des nouvelles. Pour découvrir un auteur, ce n'est pas le mieux, nous avons l'ensemble des nouvelles dans les bras.

Ensuite, nous avons les anthologies, le pire choix au niveau de la classification. Tous les auteurs sont mêlés, on va trouver des nouvelles qui sont dans d'autres recueils. Toutefois, c'est aussi la meilleure solution pour découvrir des auteurs. (Nouvelles des siècles futurs, et son alter ego fantaisiste sont d'excellents exemples d'anthologies de découverte)

La nouvelle, comment peut-elle se faire aimer, alors qu'elle ne peut offrir une image fixe ?

		Epistolier a écrit : La nouvelle, comment peut-elle se faire aimer, alors qu'elle ne peut offrir une image fixe ?

Question intéressante. Peut-être que ceux qui l'aiment par préférence apprécient les images mouvantes ;-) ? En même temps, pour moi, la nouvelle représente une image + fixe (au sens de "l'arrêt sur image") qu'un roman, que je ressens comme plus ondoyant : un protagoniste peut (et doit, amha, quand le roman est bon) évoluer sur qq centaines de pages. Id. pour l'action.

En prenant des renseignements sur des auteurs SF d'outre-atlantique reconnus et absents de mes lectures, j'ai pu constaté que des gens comme Mike Resnick et Michael Swanwick, si j'en juge par des listes de prix longues comme le bras, sont considérés comme des nouvellistes de tout premier ordre.
Alors pourquoi leur oeuvre romanesque a-t-elle été amplement diffusée en France (en particulier celle de Resnick) et leurs recueils de nouvelles quasi-absents (carrément absents pour Swanwick)?
M'enfin... Pourquoi?...

		Citation : Alors pourquoi leur oeuvre romanesque a-t-elle été amplement diffusée en France (en particulier celle de Resnick) et leurs recueils de nouvelles quasi-absents (carrément absents pour Swanwick)?

je crois que le phénomène est aussi existant aux USA.

Même si je suis une fanatique de la nouvelle doublée d'une empileuse de livres, force est de constater que les recueils que j'ai (*) de ces auteurs sont pour la plupart fruit des efforts de petites maisons d'édition (small press) issues du milieu fanique SF et non publiées par des grandes maisons d'édition.

Les raisons de ce triste état de fait ont pas mal été discutées et il en ressort que, depuis l'ère Greenberg qui a tué à lui tout seul en le saturant le marché de l'anthologie/recueil, les éditeurs ont pu constater qu'un recueil d'un auteur se vend moins bien qu'un roman du même. Les seuls recueils parus chez de grands éditeurs (sauf peut-être Baen Books) sont donc généralement des sortes de "bonus" pour faire venir un auteur dans sa collection ou pour lui arracher un nouveau roman.

(*) :
Swanwick
Gravity's angels (Frog)
Moon dogs (NESFA Press)
Tales of old earth (Frog)
Resnick
Stalking the wild Resnick (NESFA Press)

actusf a mis en ligne l'enregistrement audio d'une conférence des Utopiales 2008 sur La nouvelle.

De nombreuses questions soulevées.

Participants non affichés (s'ajoutant à un brelan de dames) : Xavier Mauméjean, Tom Clegg et l'animateur (dont j'ignore le nom; prénom : Jean-Claude...)

		Jim : et l'animateur (dont j'ignore le nom; prénom : Jean-Claude...)

Me semble reconnaître la voix de Jean-Claude Dunyach.

		scifictif : Me semble reconnaître la voix de Jean-Claude Dunyach.

Après comparaison avec une autre conférence, il me semble bien que tu aies ouï juste...
Merci.

Allez, zou ! Deuxième fournée (même source) :

Imaginales 2011 - Écrire des nouvelles de SF, la passion de la forme courte