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morca

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Frankenstein ou le Prométhée moderne

Mary Shelley


Frankenstein ou le Prométhée moderne
Traduction : Joe Ceurvorst
Titre original : Frankenstein or The Modern Prometheus
Première parution : 1818

 Pour la présente édition :

Editeur : Gallimard
Collection : Folio
ISBN : 2070415848

Ce livre est noté   (5/5 pour 1 évaluations)


J'ai lu ce livre et je souhaite donner mon avis
La critique du livre
Lire l'avis des internautes (10 réponses)

Je transpire un peu en amorçant cette chronique. Car Frankenstein est un monstre.
Le livre, pas celui qui porte ce patronyme, puisque l'on sait que, contrairement à ce que certains se figurent (mais pas dans ce forum), Frankenstein n'est pas le monstre, mais son créateur.
Je transpire et je tremble, car il s'agit non seulement d'un des jalons incontournables qui mène à la SF que nous connaissons, un ancêtre de poids, mais aussi un récit mythique.
Frankenstein et son monstre posent à côté des plus grandes figures de la modernité : Tarzan, le docteur Jekyll, Sherlock Holmes et quelques autres.
Je tremble mais me rassure sur un point : je ne risque guère le spoiler ;)

Commençons par la genèse de l'oeuvre :
Un soir d'hiver morne et pluvieux, un groupe d'amis s'ennuient dans une demeure bourgeoise.
Il s'agit d'individus non des moindres : Lord Byron, sa maîtresse Claire Clermont (demi-soeur de Mary),son secrétaire le docteur John-William Polidori, Percy

Shelley

, le poète, et Mary

Shelley

(fille du philosophe politique rationaliste William Godwin) qu'il avait enlevée deux ans plus tôt. Pour rompre l'ennui, on discute, on propose un jeu. Un jeu littéraire, bien sûr : chaque participant devra écrire une histoire surnaturelle inspirée des romans gothiques allemands. Chacun part de son côté, mais seule Mary mènera le jeu à sa fin, pour notre grand contentement. Elle crée un ouvrage inoubliable, doté d'un des plus grands personnages romanesques, et marque l'histoire de la SF, d'un coup d'un seul.
Lorsque l'oeuvre paraît, elle n'a que 20 ans.


L'histoire :
Elle est connue dans ses grands traits. On peut supposer cependant qu'elle est déformée dans l'esprit de beaucoup. C'est que Frankenstein a rencontré son audience à travers les adaptations d'auteurs. Le cinéma notamment, qui a vulgarisé le récit, tout en le déformant à l'excès : château gothique empli de chauve-souris, mécanismes baroques et électriques, populace en colère armée de fourches, monstre cousu voire boulonné.
Rien de tout cela dans l'oeuvre de

Shelley

, qui est, dans son imagerie, beaucoup plus fine.

le récit commence ainsi :
Un scientifique, Robert Walton, mène une expédition folle vers le pôle. Malheur lui en prend : le navire et l'équipage se retrouve coincé dans les glaces. Scrutant désespérément l'horizon, on croit apercevoir un homme sur un traineau, filant à vitesse vertigineuse. L'incrédulité s'évanouit lorsqu'on recueille un deuxième homme : il s'agit de Frankenstein.
Frankenstein, en triste état, est soigné. Lorsqu'il va mieux, celui-ci confie la raison de sa présence en un lieu si peu propice à la vie humaine : il commence alors le récit de son histoire.
Le scientifique génial a créé un être vivant à partir de morceaux de cadavres (de manière plus fine, apparemment, qu'un simple assemblage de membres cousus au fil chirurgical). Puis, effrayé, il s'est enfui. Mais le monstre le poursuivra, pris entre le désir de reconnaissance, le besoin de lien social, et une volonté de vengeance pour un homme qui l'a fait monstre pour finalement le rejeter.

Le style :
Rappelons que le récit est ainsi constitué :
1- d'abord des lettres de Robert Walton à son épouse. 4 lettres, dont la quatrième semble se terminer ainsi : "J'ai décidé de consigner chaque soir... Ce manuscrit te procurera...". Walton semble donc nous dire que le récit qui suit est sa retranscription de la narration que lui en fait Frankenstein.
2- l'histoire de Frankenstein racontée au passé et à la première personne...
2'- Au coeur de l'histoire de Frankenstein, l'histoire du monstre, relatée également à la première personne.
3- A la fin de l'histoire de Frankenstein, on retrouve la lettre de Walton, qui n'était pas terminée, et qui commence ainsi : "Maintenant que tu as lu cette étrange et terrible histoire..."
Cette construction ne cesse de me laisser songeur. A la fois, on lit l'histoire des deux grands protagonistes comme subjectivement relaté, mais, en de même, on peut être amené à penser qu'on lit, par exemple, l'histoire du monstre rapporté par Frankenstein retranscrite par walton, comme un récit en poupée russe.

Juger de l'écriture est toujours ardu. Il s'agit en premier lieu d'une traduction parmi d'autres. Le style est très agréable, et on sent le souffle du romantisme passer dans les pages. Il y a cependant quelques longueurs, un léger excès dans certaines afflictions. "Le roman, un peu guindé certes, légèrement entravé par un certain pédantisme moral(...)" nous dit Lovecraft. L'attente du crime au mariage de Frankenstein est un morceau douteux, quant à la tenue du récit : la surprise qu'on voudrait nous faire, apparemment, est un tel petard mouillé qu'on se demande si c'était vraiment le but de l'auteur de nous la faire, la surprise. Si c'est le cas, c'est le plus gros bémol sur un livre, somme toute, globalement remarquable.
Bourré de détails, des réflexions - pour ne pas dire des ruminations - des protagonistes - le livre offre quantité de thèmes, dont ceux de l'origine, de la nécessité du lien social, des excès possibles de la science, du double, etc... On pourra se poser la question également, du pourquoi Frankenstein donne naissance à un être composé de cadavres, juste après la mort de sa propre mère, et si le désir de vengeance du monstre, face à un créateur qui l'abandonne, n'est pas sans lien avec la relation de Mary à une famille, notamment un père, qui, à en croire, s'en est peu occupé.

Une oeuvre à lire, dans tous les cas, pour ceux qui en aurait fait l'économie. Pour plusieurs raisons :
- Mary

Shelley

, en écrivant son récit, fait créer son monstre par la science. Par cette accroche à une rationalité scientifique dont l'auteur n'ignore pas qu'elle devient centrale, elle fait basculer le fantastique vers la science fiction.
- Son oeuvre retrouve en notre époque de clonage, de manipulations génétiques, etc... une nouvelle actualité.
- Et en plus, le récit est prenant...
Un très bon candidat pour une étude approfondie, dont il aurait fallu, déjà et ici, en dire bien plus...




(4ème du Marabout de 1978).

Sa peau jaunâtre dissimulait à peine le lacis sous-jacent de muscles et de vaisseaux sanguins. Sa chevelure était longue et soyeuse, ses dents d'une blancheur nacrée, mais cela ne faisait que mieux ressortir l'horreur de ses yeux vitreux...
Frankenstein : monstre de chair et de sang, reflet perverti de l'homme qui l'a créé.
Frankenstein : incarnation du mal, représentation de notre nature malfaisante enfouie et à nouveau libérée...
Frankenstein : découverte prodigieuse d'un savant maudit ou annonce d'une apocalypse scientifique ?


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Cette critique est signée morca
5 réponses y ont été apportées. Dernier message le 24/07/2017 à 14h00 par Jim

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