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vlepoint

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10/02/2011
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recherche auteur de la nouvelle suivante

10/02/2011 à 11h15 
Bonjour à tous

Je suis nouveau sur le forum. Passionné de SF depuis mon adolescence, j'ai eu un doute quand une professeure du collège m'a montré un texte soit disant écrit par 4 élèves de 4ème, texte que je vous livre plus loin. Je pense avoir lu il y a longtemps une nouvelle se rapprochant de celle-ci. Merci de lire ce texte superbe et de m'indiquer si vous connaissez l'auteur afin que je puisse indiquer à ces demoiselles talentueuses qu'on doit citer ses sources quand on plagit.

Merci à tous, voici la nouvelle:

EXPERIMENT IV

"Je n'ai pas le choix. C'est la seule solution..." Au dernier moment, je repense à ce qui nous a menés jusque là...

Individu n°2:
Assis sur l'herbe, j'observe les trois individus assis à côté. Ils discutent et ne se soucient pas de moi. Bizarrement, je ressens la nécessité de dire quelque chose; j'interviens maladroitement dans la conversation et s'ensuit un lourd silence. Ils me répondent finalement, l'air gêné et se détournent aussitôt. Je me lève lentement, marche, et lorsque je suis sûr qu'ils ne peuvent plus me voir, je me mets à courir. Des scènes comme celle-là j’en vis tous les jours, mais je n’arrive pourtant pas à m’habituer à l’indifférence des autres à mon égard.
Je crois que cela me fait encore plus mal que s'ils me rejetaient vraiment. Ces regards en coin, ce malaise... C'est tellement humiliant. Rien ne les empêche pourtant de m’exclure. Il n'y a pas de règles ici. Seulement des principes. C'est par principe qu'ils ne me rejettent pas. Afin de ne pas chambouler leur vie tranquille, de vivre pleinement leur bonheur, ils acceptent tout et ignorent ce qui peut déranger...
Ils savent que je ne suis pas comme eux. Ils le sentent…
Mes yeux se brouillent. Un goût salé emplit ma bouche. Que m'arrive-t-il? Je me cache. Il ne faut surtout pas que les autres me voient ainsi...

Cahier de bord du Docteur:
5eme jour depuis le début de l'expérience:
Nos cobayes semblent encore plus primaires que tous ceux que nous avons testés jusque-là. Des siècles qu'ils sont ici, et ils ne connaissent aucune évolution... Ils mènent une vie toute rose, ne se posent aucune question. Ils vivent en totale harmonie avec la nature et entre eux. Ils partagent tout, ne possèdent rien, passent leurs journées à jouer, sans se soucier de rien, isolés du reste du monde... C'est beau... Et nous allons tout gâcher... Ils ne réfléchissent pas beaucoup, certes, mais en semblent bien plus heureux...
Seul l'un d'eux semble...différent. Il a été catalogué comme "individu n°2". Il a l'air de réfléchir, de se poser des questions. Mais surtout, contrairement aux autres, il a l'air triste. Je l'ai aperçu en train de pleurer.
Après tout, ils ont peut-être raison de ne pas se poser de questions... C'est peut-être la seule façon de vivre réellement heureux... Mais une fois que l'on commence à s’en poser, c'est comme une drogue. On ne s'arrête plus, et il nous faut absolument des réponses... C'est malheureusement beaucoup trop tard que nous, les hommes, avons commencé à nous en poser... Et le vice profita de ce retard pour s'inviter dans nos esprits et ne plus en sortir. Nous aurions pu éviter tant de choses, SI SEULEMENT NOUS N'AVIONS PAS FERMÉ LES YEUX... Si seulement nous ne nous étions pas dit « C'est normal, ce n’est pas grave... »... Nous aurions pu éviter tant de choses... En allant des massacres pendant les guerres, des régimes de dictature qui se sont installés, jusqu'à la consommation de masse... Nous en venons à notre problème... Notre monde est totalement régi par ce genre de système, démocratie, république... Que de noms! C'est pour endormir l'esprit des gens... On nous engraisse l'esprit pour mieux nous bouffer. Comme si nous avions besoin de ça. Comme si nous n’étions pas assez influençables...


Ce système, soi-disant égalitaire, tout le monde y croyait...
Pfft... Il est en train de tourner à la dictature, leur beau système! Nous perdons tous nos acquis. Les riches gouvernent tout. Nous vivons dans un monde où, si l'on essaye de s'éloigner un peu du troupeau, on est broyé, écrasé, rejeté comme un déchet. Ah, elles sont belles, leurs devises! Mais derrière leurs beaux mots, voilà ce que j'entends, moi! « Travaillez, consommez et payez! ». On fait travailler les gens, on en licencie quelques uns, on leur « offre » des produits tout prêts, le confort, le luxe, on se remplit les poches, on fait passer deux, trois réformes et tout le monde est content!
La base du problème? C'est la consommation. Ou plutôt, la possession matérielle. Tout est calculé dans le but de gagner de l'argent, des biens... Ils sont presque divinités...
Il faut trouver une solution pour y remédier... Une sorte de voyage dans le temps, un retour en arrière, une deuxième chance... C'est pourquoi nous faisons ces expériences...
Je rejoins l'équipe scientifique. Nous devons continuer l'observation de cette civilisation avant de lancer la suite des opérations...

Individu n°2:
Une chose étrange est arrivée aujourd'hui... Ce sont les femmes qui ont alerté une partie de la communauté. Elles lui ont fait comprendre qu'elles avaient découvert quelque chose. Quelque chose d'inconnu. Tous se sont hâtés de les suivre. J’ai suivi le mouvement. Inconsciemment nous avons formé un cercle autour d'elle. Nous avons observé, fascinés, la pierre. De petite taille, elle étincelait, semblant refléter la lumière du ciel.
Soudain, rompant le charme, l'un de nous s'en approcha et, alors qu'il l'effleurait, la chose se produisit; la lumière devint intense, aveuglante. La pierre se dédoubla et la partie née de l'autre se dirigea vers celui qu'elle avait désigné comme son futur propriétaire, tandis que l'autre ne bougea pas.
Tout alla ensuite très vite, et dans une grande effervescence, une file se forma. Chacun à notre tout nous allions chercher ce cadeau. Le premier...


Cahier de bord du Docteur:
Ça y est ! Nous sommes enfin passés à la partie « action » de l’expérience. Nous avons semé la graine qui, nous l’espérons, portera ses fruits. Mais c’est une perle et non une graine que nous avons implantée dans leur havre de paix. Une perle un peu spéciale… Nous avons ensuite observé leurs réactions face à ce qu’ils ont considéré comme un cadeau.
C’est la quatrième fois que nous tentons l’expérience. Nous soumettons des civilisations primaires au désir de posséder en leur faisant « don » d’un cadeau empoisonné. Un cadeau qui aiguisera ce désir… Aucune civilisation n’a pour l’instant résisté. Bientôt, ce qu’ils considèrent comme un miracle aura bientôt l’effet d’une bombe…
Mais nous ne perdons pas espoir. Nous espérons toujours trouver une échappatoire. Une solution qui sauverait notre monde. Pour la trouver, cette solution, il nous faut d’abord aller à la source… Comprendre ce système qui nous détruit, comprendre comment il est né. C’est pourquoi nous essayons de reproduire, de restituer ce qui a dû se passer. Pour cela, nous avons réuni toutes les conditions, tous les facteurs nécessaires. Le plus important : une civilisation comme nous devions l’être ; ne connaissant ni l’argent, ni les biens matériels…
Nous espérons…


Individu n°2
Seul, entouré de grands arbres, je marche. J’ouvre la main ; sur ma paume moite roule la perle. Je la contemple, pensif. Je ne sais pourquoi, mais je sens que cette apparition va bouleverser nos petites habitudes… Je suis inquiet. Les autres semblent obnubilés par cette pierre et ne soucient pas outre mesure de cette mystérieuse arrivée. Après tout, nous n’avons aucune idée de la façon dont elle est parvenue jusqu’à nous, de la façon dont elle évoluera et les conséquences qu’elle aura. Des voix me sortent de ma réflexion. Je tends l’oreille et les entends se rapprocher. Je commence à m’éloigner quand quelques mots retiennent mon attention :
« Pourquoi n’avons-nous pas eu de perle, Papa ?
- Je ne sais pas… Mais ne t’inquiète pas, je suis sûr que cela va s’arranger… »
Intrigué, je les interpelle. Le père m’ignore et continue son chemin. Son fils se tourne vers moi et me dit, avant de le rejoindre :
« La pierre a arrêté de se dédoubler… »

Cahier de bord du Docteur :
Voilà plusieurs jours que la perle ne se dédouble plus. Les conséquences s’en font déjà sentir. Deux catégories commencent à se distinguer. Bien sûr, ils ne s’en rendent pas compte. Pas encore… Les seuls signes de cette différence se manifestent pas une sorte de malaise croissant.
Les propriétaires de perles se rassemblent petit à petit. Ils semblent « couver » ces pierres, ne s’en séparent plus, les idolâtrent…

Individu n°2 :
Les autres ont déclaré que, pour pouvoir discuter de ce qui se passe en ce moment, il leur fallait un lieu calme, isolé et accueillant. Tous se sont mis au travail et ont fabriqué avec ce qui leur tombait sous la main une sorte de lieu, fermé par quatre murs de branchages et recouvert par un assemblage de feuilles... Ils sont entrés à l'intérieur et ont parlé. Ah, ça, ils ont parlé! Mais lorsque je leur ai demandé ce dont ils étaient convenus, ils ne m'ont rien répondu d'autre que:
"Attendre...Nous verrons bien ce qu'il va se passer et à ce moment-là, nous aviserons..."
Ils sont actuellement en train de se demander que faire de "l'abri" -c'est ainsi qu'ils nomment la construction-. Ils ont finalement tiré au sort, mais quelques uns, déçus, ont décidé de se construire eux-mêmes un abri similaire. Tous se sont remis au travail et très vite, chacun a eu un abri à soi.
En me promenant entre les différentes constructions, je remarque que les "perleux" se sont tous regroupés autour de la perle d'origine -en effet, même après ce qu'il s'était passé, ils ne l'avaient pas déplacée- tandis que les "non-perleux" sont tous excentrés.

Cahier de bord du docteur :
Ces derniers jours, les choses ont évolué plus vite que prévu… Ils ont construit des habitations, et chacun tente d’en avoir une plus grande que celle de son voisin. Sans grande surprise, un système d’échanges commence à apparaître également : certains troquent leurs perles contre de la nourriture et de l’eau. Les « perleux » profitent des « non-perleux », ils les considèrent peu à peu comme « inférieurs » alors que ces derniers les envient de plus en plus. A présent, ils seraient prêts à tout pour posséder une perle. Posséder…
De mon côté, j’ai continué d’observer mon « individu n°2 ». Il m’interpelle, celui-là. Il… ne réagit pas comme les autres. Il a même offert sa perle à une famille sans rien demander en échange. Intriguant… J’ai tout de même un peu peur pour lui : il risque de se faire marcher sur les pieds, il est assez vulnérable… Je vais continuer à le surveiller.

Individu n°2
Cette histoire de perle prend des proportions importantes. Au début les autres échangeaient les perles contre des ressources vitales, puis contre des services comme surveiller les plus jeunes ou les nourrir. N’ayant plus assez de perles, « les perleux » ont décidé que n’importe quel matériau pourrait être troqué. Évidemment, ils en ont profité pour se précipiter sur tout ce qui ce qu'ils trouvaient sans annoncer la nouvelle aux autres. Ceux-ci ont mal pris le fait d’avoir été laissés de côté. Ils l’ont mal pris, certes, mais ne protestent pas pour autant. Ne protestent pas lorsque qu’un « dominant » est désagréable avec un « dominé » -comme ils disent tout naturellement-, qu’il « l’utilise » pour agrandir son abri ou vivre avec plus de nourriture et de confort. Mais est-il trop tard pour rétablir l’équilibre ?

Cahier de bord du Docteur:
Ici, au laboratoire, c'est l'effervescence. Tout le monde est débordé. Nous effectuons un grand travail et avançons à pas de géant. Tout est très bien organisé: nous sommes répartis en plusieurs équipes, chacune ayant un rôle différent.
Une première équipe s'occupe de la partie observation. Elle analyse, note les moindres faits et gestes de nos cobayes. Elle transmet ensuite ses rapports à une autre équipe chargée d'en tirer des conclusions. C'est dans cette équipe que je travaille. Elle est composée essentiellement de psychologues, psychiatres et psychothérapeutes...Une autre équipe s'occupe du « social ». Elle, fait des projections, des statistiques, des pourcentages... Tout est généralisé. Chaque déduction s'applique à tous les individus sans exception...
Je sais très bien que leurs résultats auront le plus d'importance car c'est ainsi que marche le système actuel. On ne considère plus que la masse, et non l'individu.
Enfin, je m'égare...
La dernière partie consiste en un véritable travail de réflexion et de recherche. Cette équipe est chargée de trouver des solutions. Je ne crois pas qu'il y ait encore beaucoup de résultats de ce côté-là...
Pour revenir sur l'évolution qu'est en train de connaître cette civilisation, nous avons observé ces derniers temps, un phénomène étrange qui se propage de « l'autre côté »... Il touche principalement les « perleux » ou « dominants ». Ces derniers commencent à se...hum...disons, se ressembler, à se « copier ». Se copier dans leurs comportements et leurs gestes. Ils forment des groupes, prennent des initiatives à plusieurs. Ils n'entretiennent pas de rapports « amicaux », mais passent pourtant tout leur temps ensemble.
Ils s'efforcent d'être dans la « norme » mais secrètement, ils se méfient et se jalousent...
Ils sont la base même de ce qui deviendra l’ « élite »...
C'est ce que l'on appelle dans notre monde « l'effet de mode », ou encore « l'effet de groupe ».
On peut analyser cela en en disant que c'est encore un moyen (après celui qui consiste à posséder le plus possible) de ne pas se faire rejeter. Se faire rejeter... C'est une question qu'ils ne se posaient pas avant.
Il paraît si loin, le temps où ils étaient heureux, où ils acceptaient tout... Mais lorsque je regarde mes notes, je n'arrive pas à croire que cela fait seulement quelques mois que l’expérience a débuté...
Nous nous posons à présent les mêmes questions que celles que nous nous posions à propos de notre propre système...
Pourquoi, comment les biens matériels, le désir et la possession ont-ils pris autant d'importance? Certains scientifiques sont persuadés qu'il est dans la nature humaine de vouloir posséder. Mais, en ce cas, ne peut-on pas résister à la tentation? L'exemple de n°2 dans cette civilisation, ou de mouvement de résistance dans la nôtre, le prouve bien...
Pour ma part, je pense surtout qu'il est dans la nature de l'humain d'être fainéant: il est tellement plus simple de choisir le confort, la facilité, de se laisser porter par le système, de ne pas résister...
Mais pourquoi posséder les rend-il si jaloux, méfiants et agressifs? Tous ces sentiments sont humains. Je ne pense pas qu'on les retrouve chez les animaux, ou alors, pas à la même échelle... Si les hommes – eux comme nous - sont agressifs, c'est parce qu'ils ont peur. Peur pour leurs misérables objets, pourtant si chers à leurs yeux...Ils ont peur pour eux... S'ils sont méprisants, c'est parce qu'ils ont besoin de se sentir forts. Ils savent donc qu'ils sont faibles. Inconsciemment, ils le savent... Ils font subir à d'autres ce qu'ils ont peur de subir eux-mêmes...

Individu n•2:
Les autres sont sans arrêt sur leurs gardes, veulent toujours plus et ne sont donc jamais heureux... Dès qu'ils entrent en possession d'un quelconque objet, souvent sans grand intérêt, ils n'en profitent même pas, s'en lassent, ils ne font qu'amasser.
Tout se dégrade, notre ancienne vie semble peu à peu s'évaporer sans que personne ne fasse un geste pour la retenir... N'y aurait-il que moi qui me rende vraiment compte du changement que nous sommes en train de subir? Oui, subir... c'est le mot... Nous sommes des victimes. Ils sont des victimes. Libres à eux de faire ce qu'ils veulent, mais je ne me laisserai pas engloutir par ce nouveau système, je résisterai... Car c'est bien là tout le problème, ils n'ont pas assez de recul, et si moi, j'en ai, c'est parce que j'ai toujours été différent, toujours été un peu à l'écart.
Ils sont inconscients, ignorants. Ils se laissent porter par le mouvement, mais surtout, ils ne se posent pas de questions...
Mais peut-être est-il trop tard? Peut-être aurait-il fallu se poser des questions dès le départ? Dès que la perle est arrivée ici... La perle... Les perles ne sont aujourd'hui qu'une monnaie d'échange comme une autre... Mais elles sont la cause de tout ce qui nous arrive. Et le fait que la perle originelle ne se soit dédoublée que pour certaines personnes a achevé de réunir les conditions nécessaires à la création d'un système comme celui qui rythme dorénavant la vie de la communauté. Un système inégalitaire, sans joie, où la seule préoccupation des gens est de posséder, posséder toujours plus. Posséder, pourquoi? Posséder, pour quoi faire? Ces derniers temps, je n'ai plus que ce mot à la bouche. Je l'emploie dans chacune de mes phrases, et quand je ne le dis pas, je le pense, je le hais si fort qu'il domine chacun de mes mots. « Posséder » a pris possession des esprits...
Je refuse de croire que tout est fini, qu'il n'y a rien à faire, que c'est normal après tout, qu'il ne sert à rien de résister. Mais tout seul, cela ne sert à rien. Il faut que j'aille leur parler, qu'ils m'écoutent et qu'ils comprennent. Je ne sais pourquoi, mais je suis sûr que notre avenir dépend de nos décisions aujourd'hui...
Je suis allé les trouver. Je me suis approché d'un groupe de personnes, celles que l'on appelle maintenant les « dominés ». Ils sont rejetés par les « dominants », mais ne sont pas exclus du système pour autant. Loin de là...
Voici à peu près le discours que je leur ai tenu:
« Hum, euh...voilà. J'ai, heu... une question à vous poser... Êtes-vous heureux?
- Regarde-nous. Tu crois que nous sommes heureux? Nous nous nourrissons difficilement, nos abris sont trop petits, nous n'avons rien à troquer, nous sommes méprisés, répondit un des hommes. Tu crois vraiment que nous sommes heureux?
- Je n'ai rien dit de tel, repris-je. Mais pourtant, il y a encore quelques mois, c'était déjà ainsi que vous viviez non? C'était ainsi que tout le monde vivait... Et tout le monde était heureux. N’aimeriez-vous pas retrouver cet ancien mode de vie? Celui où tous nous étions égaux et où rien ni personne ne pouvait troubler notre bonheur. Cela ne vous plairait-il pas?
- Tu sais, murmura une femme frêle, les temps ont changé. Il faut savoir s'adapter. Rien ne sert de courir après notre passé, il faut regarder de l'avant...
- Elle a raison, continua une autre femme de forte carrure. Là n'est pas la solution...
- Et quelle est la solution, à votre avis? leur demandai-je.
- Il faudrait que nous soyons tous égaux. Je veux dire, que tout le monde ait les mêmes chances au départ.
- Que veux-tu dire par là? l'interrogeai-je.
- Et bien, si nous en sommes là aujourd'hui, c'est parce que seulement quelques individus ont eu des perles. Si nous en avions tous eu, nous aurions tous pu faire partie du système, tous être riches, ne manquer de rien... »

A ce moment, je compris que je ne parviendrais pas à les convaincre. Ils avaient fait leur choix, avaient mis tous leurs espoirs dans ce nouveau système de consommation, ils avaient mis tous leurs espoirs dans l'évolution et le progrès. Je fus un instant secoué par le doute. Et si j'avais tort? Et si ce n'était qu'une passe difficile mais nécessaire à notre évolution? Et si la solution était réellement de s'adapter, de s'y faire? Non, cela reviendrait à abandonner. Ce serait comme dire « Je n'y peux rien, je ne peux rien y faire, je dois m'habituer, me laisser porter, ne pas résister... ». Il ne faut surtout pas que je commence à douter de moi et de mes convictions...
Comment pourrais-je persuader les autres si moi-même je ne suis pas convaincu? Je suis sûr qu'ils ne suivent pas la bonne voie. Je suis sûr aussi qu'en continuant ainsi, ils vont se perdre... Ils vont tout perdre... Peut-être faut-il avancer, peut-être, mais en gardant un œil tourné vers l'arrière...en contemplant les jours heureux...
J'essaie une dernière fois de leur faire entendre raison...
« Ne comprenez-vous pas que tout cela est malsain? Ne le sentez-vous pas? Que vous réserve l'avenir en continuant ainsi? Vous serez écrasés. Écrasés par le système. Dans ce genre de régime, la loi du plus fort est la loi de toutes les lois. Et le plus fort est le plus riche... C'est maintenant qu'il faut réagir, après, il sera trop tard...
- Mais qu'est-ce qui est malsain à la fin? Que trouves-tu de si mauvais à ce système?
- Et vous, qu'y trouvez-vous de si attirant? Vous êtes en train de tout perdre... Où est passée la joie des jours anciens? Où est passée notre belle égalité? Notre fraternité? Notre liberté?
- Nous évoluons, dit simplement un homme. Nous perdons des choses, nous en gagnons d'autres...
- Ah oui? Et qu’avez-vous ga...
- Je sais ce que tu vas dire, reprit-il, mais regarde comme nous étions naïfs... Maintenant...
- Maintenant nous sommes aussi ignorants qu'avant... Pour apprendre, savoir, il faut se poser des questions. Et n'essayez pas de me faire croire que vous vous en posez. Si c'était le cas, nous n'en serions pas là... » soupirai-je tout en m'éloignant.
Faut-il abandonner? Non. Ce n'est qu'un échec. Je ne dois jamais arrêter de me battre. Jamais...

Carnet de bord du Docteur :
Je rentre à l’instant d’une conférence, réunissant l’ensemble des chercheurs pour faire un bilan de la situation. Situation qui se dégrade plus que jamais…
Nous avons tous remarqué que le « cercle des perleux », a bien analysé le nouveau système. Ils ont bien compris que les plus pauvres ne peuvent pour l’instant rien faire contre ce qui leur déplaît. Leur problème, c’est qu’ils ne sont pas soudés. Chacun tente d’arriver à ses fins de son côté. Leur union permettrait certainement de faire changer les choses, ou au moins de les ralentir, pour pouvoir prendre d’autres initiatives dans le calme.
Malheureusement pour eux, tandis qu’ils se crêpent le chignon, les nouveaux dirigeants de la communauté profitent de la situation et les enfoncent encore plus. Sans opposition, ils parviennent à arranger le système à leur avantage, sans que personne ne s’en aperçoive.
Enfin personne… Si ! Il y a bien n°2, qui lui, s’est rendu compte qu’il fallait agir, mais… il est bien le seul !
Tous veulent avoir accès à ces produits, ils bataillent, entrent en concurrence. Une compétition qui s’annonce sans fin !
En cachette, les « gens d’en haut » instaurent des lois qu’ils font appliquer sans les révélés au grand jour. Et pour les faire appliquer, ils ont réuni un groupe de personnes chargées de faire régner l’ordre. De faire régner LEUR ordre. Ils vérifient que chacun reste à sa place, que chacun fait bien son travail. Ah, oui ! Voici la dernière nouveauté : ils ont créé des classes distinctes –elles existaient déjà, ils leur ont donné des noms- et plus l’individu se trouve dans une classe élevée (en fonction de son travail ou de sa richesse), plus il a de privilèges (paie moins cher, peut exploiter des plus pauvres, a accès à des groupes où sont prises les décisions, votées les lois…) et plus sa voix a de poids lors des élections.
La partie du peuple qui se trouve en difficulté adhère parfaitement à cela, mais celle-ci omet une chose : en voulant absolument participer à la nouvelle vie active, c’est elle qui vole vers la perdition. Sa propre perdition ! En effet, hier encore, un bébé et une femme, ont trouvé la mort. On a retrouvé leurs cadavres : leurs visages exprimaient le manque de nourriture et l’agonie à laquelle ils étaient condamnés.
Tout cela est ridicule ! Pourtant, ou plutôt malheureusement, cette nouvelle société ressemble de plus en plus à une autre que nous connaissons bien : la nôtre. Un sentiment de culpabilité m’envahit. Qu’espérons-nous ? Nous détruisons un peuple autrefois prospère et innocent pour tenter de sauver le nôtre ! Il est certainement trop tard… Les Terriens sont déjà au fond du trou…
Non ! Je suis en train de renier la raison pour laquelle nous sommes tous réunis ici… L’espoir…


Individu n°2 :
Ça y est… Les rares libertés qu'il nous restait vont partir en fumée.
Un gouvernement… "Action de gouverner", le sens de ce mot est pourtant clair. Mais personne n'a protesté quand les plus riches ont déclaré qu'ils allaient mettre en place ce gouvernement. Tout le monde a applaudi, sans chercher à comprendre ce que cela signifiait.
Nos nouveaux chefs ont promis de l'ordre, de l'égalité, de la sécurité… Comme si on avait besoin d'eux pour ça. Mais personne ne semble se rappeler qu'il y a quelques temps, nous étions libres, égaux et en sécurité. Comment peuvent-ils croire à ces beaux discours?
En ne protestant pas, ils ont tous accepté de se soumettre, de donner le pouvoir, leur pouvoir à une poignée de personnes méprisantes. À des personnes qui leur marchent sans cesse sur les pieds, qui les privent petit à petit de toutes leurs libertés. De toute façon, tout cela était prévisible. J’avais remarqué qu’un groupe de « dominants » commençait à prendre des décisions, à s’approprier le pouvoir, comme s’il lui revenait de droit. C’est bien entendu eux qui se trouvent aujourd’hui à la tête de ce beau gouvernement. Eux et quelques autres qui ont réussi à « grimper » dans la hiérarchie sociale. Des tricheurs… Je les soupçonne en effet d’avoir corrompu les dirigeants en leur offrant des objets précieux, des pierres brillantes et colorées par exemple (c’est encore une monnaie d’échange, très appréciée dans les hautes classes).
Tout cela m’écœure. Je refuse pourtant de fermer les yeux. J’ai dressé une liste d’idées, de projets à réaliser pour inverser le cours des évènements :
1-Organiser une révolution : Impossible, on ne peut se révolter seul et produire un effet dans un monde pareil.
2-Prendre le contrôle de la cité en me procurant des perles pour tout réorganiser : Impossible. Pour l’heure, acquérir des perles est extrêmement complexe.
3-Ecrire un texte pour ouvrir les yeux des plus pauvres.
4-Tout faire exploser : Pour l’instant, je pense qu’il vaut peut-être mieux éviter le génocide et trouver d’autres idées…
J’ai donc opté pour la troisième solution. La seule qui, pour le moment, est réalisable sans être disproportionnée. Mais bon… Faire circuler des tracts… Si ! C’est faisable ! Oui…

Carnet de bord du Docteur :
Je m’inquiète. Plus que jamais. J’ai beau voir et revoir tous les résultats des expériences dans ma tête, je commence à penser, comme le reste de l’équipe d’ailleurs, que nous sommes dans une impasse. C’est peut-être la fin. Il y a plusieurs jours à présent, N°2 a fait une tentative de diffusion de tracts. Il a malheureusement échoué. Ces êtres sont tellement entêtés…Ils ont pris leur décision. Ils ne changeront pas d’idée, ce mouvement, tous vont continuer à le suivre. En tous cas, j’en ai bien peur…


Individu n°2 :
Extrait du tract :
Nous subissons les conséquences de leurs actes. Il nous faut changer ça. Prendre notre destin en main ! Révoltons- nous contre ce gouvernement ! Nous ne méritons pas un tel sort ! Qu’allons-nous devenir ? Nous, êtres insignifiants à leurs yeux ? Et nos enfants ? Auront-ils l’occasion de vivre les joies que nous vivions autrefois ? Concertons-nous ! Croyons-y ! Ne nous laissons pas berner !
Rendez-vous dans trois jours, après la pleine lune!

Après deux heures d’attente sur le lieu de rendez-vous, accablé par la triste vérité, j’ai renoncé…

Cahier de bord du Docteur:
Le fait de les observer revient désormais à se regarder dans un miroir. Ils se sont totalement adaptés. Tout d'abord, adaptés à ce système de consommation, bien sûr, mais aussi à ce nouveau mode de vie qui en est la conséquence. Eux-mêmes ont changé, mais pas seulement. Leurs habitudes, l'éducation et leurs coutumes se sont aussi modifiées.
Je vais prendre un exemple. « La journée de monsieur tel. Ou untel, peu importe. Nommons le x. Monsieur x donc, commence sa journée comme toutes les autres. Il se lève, bien sûr, mange, et sort de son abri. J'ai oublié de préciser que monsieur x fait partie de la classe riche. Il ne travaille donc pas. Il passe d'abord chez monsieur y, récupérer le bâton qu'il lui avait demandé. Monsieur y est évidemment un pauvre, monsieur x ne le remercie pas, paie en lui donnant quelques fruits trop mûrs, et s'en va. Il va rejoindre ses « amis » qui l'attendent, assis à l'ombre d'un arbre. Ils parlent pendant quelques heures de leurs « affaires », puis se séparent. Monsieur x va manger chez lui. C'est sa femme, madame x, qui a préparé le repas. Elle, ne s'occupe pas des affaires. Elle demande à son mari, sur le point de retourner à son « travail » comme il le dit lui-même, de lui rapporter de la soupe que vend mademoiselle v et des fleurs de chez monsieur w, "pour décorer l'abri" dit-elle. Et chacun retourne à ses occupations. Madame x va s'occuper des enfants. Le plus jeune, k, lui demande pourquoi, chaque jour, son père s'en va alors qu'avant ils étaient toujours tous ensemble. Sa mère se fâche et lui explique que son père est parti pour les aider à vivre. Comme le petit ne comprend toujours pas, elle lui dit qu'il va tous les jours travailler pour leur rapporter de quoi manger, décorer la maison, que tous les jouets qu'il a, c'est lui qui les ramène. Il demande si c'est papa qui les a construits mais elle lui répond que non, qu'il a beaucoup trop de choses plus importantes à faire. K est déçu et ne le cache pas. Alors, la mère lui dit que de toute façon, c'est comme ça. C'est comme ça que tout le monde fait et que l'on va faire aussi. Qu'on ne peut rien y faire et que c'est très bien. « N'es-tu pas heureux de pouvoir jouer avec des jouets tout neufs? » lui demande-t-elle. Le petit lève la tête et sourit. Il lui dit:
« Plus tard, je serai comme papa et je vous aiderai à vivre! »
Ouf, j'ai fini mon histoire, j'allais bientôt arriver à court de « noms »! Bref, des scènes comme celle-là, on en a tous les jours. Ils sont persuadés, ou plutôt, ils essayent de se persuader que c'est la seule façon de vivre, ils essayent d'oublier le passé. Et je crains que ce ne soit désormais trop tard. Les efforts qu'a faits n° 2 étaient remarquables, mais malheureusement insuffisants. Ou alors, il était totalement impossible de les faire changer de voie… Pourquoi? Pourquoi? C'est la question que nous nous posons tous ici... Mais il y a de l'espoir. Cet individu pas comme les autres nous a donné de nombreuses pistes que nous communiquera bientôt l'équipe chargée des solutions. S'ils commencent en tout cas à éduquer les enfants sur ce mode-là, à leur insuffler ce genre de principes, il y a fort à parier que les futures générations ne changeront pas de voie.
Ils continueront le travail de leurs aînés pour construire peu à peu un système comme le nôtre. Après tout, que leur manque-t-il? Des connaissances technologiques, des objets plus sophistiqués, voilà tout. Sinon, tout y est. Consommation, désir, mode, classes sociales, etc... Et je crains que tout cela ne se renforce au fil des années, avec ces générations que l'on forme pour devenir de grands consommateurs. La fierté de leurs parents! C'est magnifique! Toutes les bases du régime capitaliste sont là... Je le crains…
Si l'on se reporte au début de mes notes, on pourra remarquer que le discours n'est plus le même. Nous sommes passés de « Nous espérons... » Il y a un an à « Je le crains… » Aujourd’hui. Quel pessimisme! J'ai honte de penser de cette manière. Ce n'est pas comme cela que l'on fait bouger les choses. Il faut espérer... L'espoir, source de tout... Je suis sûr que nous trouverons une solution. Je suis sûr que les « happy end » n'existent pas que dans les contes de fées.


Individu n°2
Enfin tout va s’arranger ; ce soir, tout sera réglé. Je vais mettre fin à cet enfer. J’effectue les dernières mises au point, les larmes me montent aux yeux… Non ! Je ne cèderai pas. J’ai fait mon choix et ne reviendrai pas sur ma décision. Notre monde s’est métamorphosé sans que personne ne réagisse. Hier encore, des hommes qui n'avaient pas respecté l'heure du couvre-feu, ont trouvé la mort lors d’une altercation avec les « forces de l’ordre ». En effet, il leur suffit de peu pour transformer la sécurité qu’ils sont censés faire régner en un véritable chaos. Nous n’avons plus aucune liberté, le gouvernement contrôle le moindre de nos gestes. Le niveau de pauvreté est au plus haut. L’écart entre les classes sociales se creuse à un rythme considérable. Nous ne pouvons plus vivre ainsi, quel avenir offrons-nous aux générations futures? Ils subiront les conséquences de nos choix d’aujourd’hui… Nous allons dans une impasse. Nous n’avons pas le droit de les condamner ainsi… C’est pourquoi j’ai décidé de leur offrir une chance. En reprenant tout à zéro et en espérant qu’ils ne seront pas aussi bêtes que nous l’avons été.
Je me dirige vers l’abri où toute la communauté au grand complet est rassemblée, à l’exception de quelques enfants. En effet, le gouvernement a déclaré avoir une annonce importante à faire. Je frotte deux silex l’un contre l’autre et une étincelle jaillit, embrasant le toit de feuilles. J’ai bloqué l’entrée, ils ne pourront pas sortir… Quelques secondes et des cris commencent à résonner. Oh, ironie du sort ! C’est donc bien leurs choix –car la construction et les abris en général en font partie- qui les auront tués… Le sourire aux lèvres, je vais laisser les flammes m’atteindre, et ne tarderai pas à sentir leur morsure sur ma peau. La douleur sera aiguë mais je parviendrai à garder le sourire. La vie recommencera et je souhaite à nos descendants de vivre heureux. Oui… C’est tout ce que je leur souhaite.

























EPILOGUE




Cahier de bord du Docteur :

Il ne s’est finalement pas laissé faire. N°2 se sera battu jusqu’à la fin. Je ne sais pas s’il a réellement trouvé la meilleure issue mais son geste a le mérite d’offrir une chance à ceux qui lui succèderont.
Quand à nous, nous allons tourner ce système que nous haïssons tant à notre avantage afin de le changer. Puisque ce sont les riches qui gouvernent et dirigent tout, nous allons nous servir de l’appui de certains d’entre eux pour faire passer des messages, dans les médias par exemple. Et puisque seule la masse peut faire changer les choses, nous allons la « réunir », par le biais de rassemblements, actions, … Ce qui, nous l’espérons, fera plier les autorités.
Certes, c'est la masse qui fait changer le cours des évènements mais elle n’est à l’origine composée que de quelques individus…





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vlepoint
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lacroute

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RE : recherche auteur de la nouvelle suivante 10/02/2011 à 13h42  
Si le topo répondait à un devoir, quel en était le sujet initial..?
Perso, c'est bizarre, je sens bien une seule main derrière cet écrit, le tout a un style homogène.
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