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Gui

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Zhāng Xiǎoyǔ

Saving Human Being


Saving Human Being
 Pour la présente édition :

Editeur : Ankama
Collection : Kraken
Date de parution : avril 2011
Nombre de pages : 85
ISBN : 978-2-359-10160-7

La critique du livre
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Planche intérieure
Planche intérieure
Un futur proche. Dans la carcasse d’un avion-cargo en plein désert, un robot est réactivé par le pilote qui a survécu au crash. Celui-lui demande de partir trouver de l’eau pour le sauver. Mais quand la machine revient, bien des jours trop tard, l’humain est mort. Alors, le robot repart dans le désert où il finit par s’installer dans une oasis habitée par une jeune femme et sa petite fille. Son but ? Remplir sa mission, la dernière, celle que lui a confié le pilote de l’avion-cargo avant de mourir : sauver l’Homme…

Servir l’Homme : voilà, dans les grandes lignes, la problématique sous-jacente au thème du robot (1). D’ailleurs, si les magnats virent dans la révolution industrielle un moyen d’augmenter la production des biens et donc leurs bénéfices, les ingénieurs, de leur côté, et peut-être plus naïvement, y virent surtout un moyen de libérer l’Homme du travail (2). Dans le registre opposé, celui de l’avenir, ou du moins d’un futur possible, Iain M. Banks nous présente l’aboutissement de cette idée avec son cycle de la Culture ; le trucage, ici, repose sur le concept de l’intelligence artificielle qui, à y regarder de près, se différencie assez peu de celui du robot tel que présenté ci-dessus (3).

Pour ce faire, il faut des règles. Ou plutôt des lois, et en l’occurrence des lois de la robotique. Sans celles-ci, en effet, rien ne pourrait assurer l’obéissance du robot. Pire, il pourrait même se révolter comme il le fit d’ailleurs durant des décennies sous les plumes successives de différents auteurs, jusqu’à ce qu’Isaac Asimov entame son cycle des robots positroniques en basant ses récits sur l’idée que les robots se trouvaient soumis à des programmes permettant de s’assurer leur obéissance – des lois, donc.

Mais, au fond, « servir l’Homme » ne consiste-t-il pas à « sauver l’Homme » ? Et notamment en lui épargnant toutes ces tâches aussi ingrates que dangereuses telles que le travail à la chaîne dans un passé proche ou bien la mort sur un champ de bataille dans un avenir probablement encore assez éloigné, parmi d’autres exemples. Asimov, encore lui, dans Les Robots et l’Empire (1985) préfigure d’un certain point de vue la Culture de Banks en montrant comment un robot écope de la mission assurément surhumaine consistant à protéger l’Humanité toute entière, non contre un hypothétique ennemi venu d’ailleurs mais bel et bien d’elle-même (4).

Zhang Xiaoyu part ici d’un postulat comparable. Toute la différence avec l’œuvre d’Asimov tient dans ce que l’auteur, ici, est un artiste et qu’il fait donc passer la substance humaine avant les éléments techniques. Pour cette raison, Saving Human Being ne tente même pas de noyer le poisson et au lieu de ça adopte vite les accents de la poésie où la forme prend le pas sur le fond et où le discours – somme toute déjà vu quelque part – disparaît sous le récit lui-même, sous ce torrent d’émotions pures qui avec ses airs de fausse naïveté nous donne une leçon de vie à la force rare – et même si là aussi on a déjà vu ça quelque part, comme une évidence trop longtemps oubliée.

Quant à la forme artistique proprement dite, qui complimente très bien la narrative en dépit de quelques faiblesses ponctuelles concernant certains visages, elle témoigne d’une maîtrise technique et d’une sensibilité souvent surprenantes dans l’expression des mouvements. Ceux de la petite fille en particulier trouvent là un moyen assez inhabituel de faire passer le caractère et la personnalité de cet enfant qui jouera un rôle fondamental dans l’évolution du robot, dans ce regard empreint de curiosité et de questions que la machine pose sur cet Homme qu’elle doit sauver.

Pour sa dimension humaine qui rappelle celle de la fable, du discours éternel, de la poésie salvatrice, Saving Human Being compte parmi ces œuvres bien trop rares, ces perles crève-cœur à découvrir de toute urgence, ces morceaux de bravoure narrative extraordinaire. Mais aussi, cette courte bande qui se place dans la lignée de la science-fiction la plus classique – qu’elle prolonge avec brio – nous prouve que celle-ci peut malgré tout encore nous emmener jusqu’à des sommets d’émotions rarement atteints.

(1) Gérard Klein, préface à Histoires de robots (Le Livre de poche, collection La Grande anthologie de la science-fiction n° 3764, 1974, ISBN : 2-253-00061-2) ; lire ce texte en ligne.

(2) l’idée fait d’ailleurs de plus en plus son chemin : outre des textes précurseurs tels que Le Droit à la paresse (1880) de P. Lafargue (Mille et une nuits, ISBN : 978-2-910-23330-3) ou bien Travailler, moi ? Jamais ! – L’Abolition du travail (The Abolition of Work, 1985) de B. Black (L’Insomniaque, ISBN : 978-2-915-69451-2), le mouvement altermondialiste Bizi ! propose de réduire le temps de travail de chacun à une heure par jour à peine.

(3) sur la faisabilité technique de l’intelligence artificielle, le lecteur curieux se penchera avec bonheur sur la préface de Gérard Klein au roman Excession (Le Livre de Poche, collection Science-Fiction n° 7241, ISBN : 2-253-07241-9) ; lire ce texte en ligne.

(4) bien sûr, une telle solution présente des accents assez nihilistes : confier à la machine nos problèmes fondamentaux consiste d’une certaine manière à nous en délester, bref à fuir nos responsabilités – j’ai déjà évoqué ce sujet dans ma chronique du jeu vidéo Armored Core 3 (From Software ; 2003).


Note :

Une mention en page deux indique que cet ouvrage est une adaptation du roman en langue chinoise Mission: Saving Human signé Liu Weijia.




J'ai fini par comprendre le but de ma mission : ce n'est pas seulement de sauver la vie des humains mais, plus encore, de sauver leur futur.


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