Alors que la famille Zabi se retrouve sur Side 3 pour rendre un dernier hommage à Garma, un vaisseau de Zeon descend sur Terre : à son bord, Ramba Ral et son unité d’élite ont pour mission de venger la mort du plus jeune fils de Zabi en détruisant le White Base et l’unité prototype Gundam tout en testant un nouveau type de mobile suit. Alors que Gihren Zabi prononce l’éloge funèbre de son frère cadet – en réalité un discours de propagande destiné à galvaniser la volonté des citoyens de la principauté dans l’effort de guerre – Ramba Ral mène sa première offensive sur le White Base ; cette attaque laissera l’équipage perplexe, surtout Amuro, car en dépit de son avantage tactique indiscutable l’assaillant s’est replié sans donner le coup de grâce, pourtant à sa portée… Non loin, dans une taverne de Jaburo, Char Aznable est mis aux arrêts par un agent de la garde rapprochée de Kycilia Zabi. Celle-ci descend sur Terre en personne pour l’interroger afin de savoir pourquoi il n’a pas porté secours à Garma : Char feint l’innocence mais, sous la pression de Kycilia, il finit par négocier sa libération contre le moyen, pour Zeon, de s’infiltrer dans la forteresse de Jaburo, quartier général de la Fédération contre lequel l’artillerie de la principauté se casse les dents depuis des mois… De son côté, Ramba Ral reçoit un nouvel appareil de transport de mobile suits pour continuer à poursuivre le White Base mais sa seconde offensive contre le vaisseau en fuite se déroule moins bien que la première, en dépit de sa victoire écrasante contre le Gundam, et un de ses hommes est fait prisonnier. Alors que celui-ci se fait interroger, Amuro tente de comprendre comment ce nouveau modèle de mobile suit piloté par Ramba Ral a pu ainsi lui faire mordre la poussière ; c’est alors qu’il surprend une conversation entre Mirai et Bright : ce dernier a l’intention de confier le pilotage du Gundam à quelqu’un d’autre. Profondément blessé, Amuro rassemble ses affaires et, au milieu de la nuit, quitte le White Base à bord du Gundam sans aucune autorisation de Bright…
De nouveaux personnages apparaissent dans ce volume :
Degwin Sodo Zabi : magnat de l’industrie, c’est avec sa fortune colossale qu’il finança la révolution de Side 3 qui permit à Zeon Zum Daikun d’y fonder la République de Zeon en tant que nation séparée de la Fédération ; Daikun dirigea la colonie jusqu’à sa mort aux circonstances d’autant plus douteuses que Degwin Zabi s’autoproclama maître de Side 3 sitôt Zeon Zum décédé. Bien qu’en apparence toujours maître de Side 3, dont il fit la Principauté de Zeon peu après son accession au pouvoir, son autorité a en fait été depuis longtemps remplacée par celle d’une nouvelle génération d’intrigants…
Dozle Zabi : second fils de la famille Zabi, il commande la Force d’Attaque Spatiale de Zeon. En charge de la forteresse spatiale de Solomon, il se considère comme un soldat honorable et gagne le respect de ses troupes en se battant à leurs côtés : soucieux d’accomplir la volonté de son père, il feint d’ignorer les complots que trame le reste de sa fratrie. Malgré son allure de colosse couturé de cicatrices, Dozle est très touché par la mort de son plus jeune frère, Garma, auquel il était immensément attaché.
Gihren Zabi : fils aîné de la famille Zabi, c’est en réalité le véritable maître de Zeon qui a réduit son propre père, Degwin Sodo, au rôle d’une marionnette dont il tire les fils. D’une intelligence prodigieuse mais aussi complètement mégalomane, il fut l’un des principaux artisans derrière le coup d’état qui permit de fonder la Principauté de Zeon sur la colonie de Side 3. En tant que Commandant Suprême des force militaires de Zeon, il dirige la course de la guerre depuis son Q.G. de Side 3. Son propre père l’a un jour comparé à Hitler…
Kycilia Zabi : avant-dernier enfant de Degwin Zabi, et son unique fille, elle voit en son frère aîné Gihren le seul obstacle à sa soif de pouvoir. Commandant la Force d’Assaut Mobile de Zeon d’une main de fer, elle est très douée pour rassembler des informations mais aussi pour faire adopter les nouvelles technologies qui assurent la suprématie de Zeon sur la Fédération. Cependant, sa rivalité constante avec ses frères tend à miner les efforts de guerre de la principauté…
Ramba Ral : fils de Jimba Ral, partisan quasiment fanatique de Zeon Zum Deikun qui fonda jadis la République de Zeon avant que la famille Zabi n’usurpe sa place en l’assassinant, Ramba Ral est un pilote émérite dont la carrière aurait été toute tracée si son ascendance familiale ne l’avait pas placé dans une position délicate vis-à-vis des plus hautes sphères politiques de Zeon. Envoyé sur Terre aux trousses du White Base, il devra faire face à de nombreux démons issus d’un passé bien trop lourd pour ses épaules pourtant puissantes…
La densité de ce tome rend sa chronique difficile car la somme d’éléments nouveaux qu’il présente dépasse largement celle de n’importe lequel des précédents ; il faudra cependant un lecteur averti, en termes de représentation artistique, pour saisir toute la finesse des détails : en effet, ce volume ne montre pas les choses d’une manière évidente, à travers des dialogues ou des descriptions dont la lourdeur handicape souvent la fluidité de la narration. On admire en particulier l’immense talent de Yasuhiko quand, en une paire de cadrages seulement, il nous fait littéralement sentir toute la haine et la rivalité qui oppose Gihren Zabi à sa jeune sœur Kycilia. Sa maîtrise du dessin dans les expressions des personnages est aussi l’occasion de voir, pour une fois, un Char Aznable aux abois qui doit ainsi jouer son va-tout pour se tirer de ce qui est certainement la situation la plus épineuse de toute sa vie, ou encore de se conforter dans l’idée que, décidément, Seila Mass a bien des choses à cacher ; et que dire de Degwin Sodo lui-même, lorsqu’il se lève de son fauteuil pour assister à la cérémonie funèbre de son fils cadet Garma, sous l’insistance de sa fille Kycilia venue lui rappeler son devoir de souverain : en une autre paire de cases, elles aussi dépourvues de la moindre phrase, le patriarche des Zabi exprime à la perfection combien il est conscient, et depuis longtemps, de ne plus régner sur Side 3…
Plus évidents, car clairement exprimés dans des images doublées de textes, on trouve aussi des détails plus inattendus. Le plus spectaculaire est certainement le désarroi d’Amuro devant ce nouvel adversaire qui se présente à lui en la personne de Ramba Ral : soldat accompli, celui-ci ne doit pas moins à son expérience de pilote ses deux victoires contre le Gundam qu’à la maniabilité supérieure de son mobile suit de test : car, au contraire des Zaku, le MS-07 Gouf qu’il pilote a été conçu par les ingénieurs de Zeon en vue de combattre en milieu à gravité terrestre, ce qui n’était pas le cas des adversaires précédents d’Amuro et qui lui avait jusqu’alors donné un avantage certain ; c’est donc là pour le jeune pilote l’occasion de remettre en question ses talents de pilotage et donc sa capacité à défendre le White Base, c’est-à-dire son rôle même au sein de l’équipage, ce qui en retour explique sa décision – certes précipitée – de quitter le navire à la fin du volume : malmené à la fois par l’ennemi mais aussi par son propre capitaine, il perd simplement la tête, ce qui en fin de compte est bien humain et donc tout à fait typique de Gundam. Soulignons enfin que cette « course à l’armement » que représente ce nouveau type de mobile suit qu’est le Gouf, quoique tout à fait caractéristique du genre mecha, est une parfaite représentation de la surenchère technologique inhérente aux guerres industrielles – souvent considérées par les historiens comme des « accélérations de l’Histoire » – et qui prend ses racines dans le conflit mondial de 14-18 pendant lequel des innovations toujours utilisées de nos jours, telles que le tank ou l’avion, trouvent leurs origines : on ne peut qu’admirer comment Gundam parvient à concilier un élément aussi profondément réaliste avec ce qui était jusqu’alors un simple truisme du genre mecha. Plus anecdotique mais néanmoins révélateur, la réaction à la vue de la foudre qu’ont les habitants de l’espace, qu’ils soient à bord du White Base ou bien du vaisseau qui amène les soldats de Ramba Ral sur Terre : étant nés et ayant grandi dans l’espace, ils ignorent tout de ce phénomène météorologique qui les paniquent en leur faisant croire à une nouvelle arme de l’ennemi ; une scène qui ne manque pas d’humour mais qui est aussi un moyen simple et efficace de souligner le fossé social qui sépare les colons de l’espace de l’élite demeurée sur Terre tout en soulignant davantage le réalisme du récit, mais cette fois à travers une description – au moins sous-jacente – de ce modèle de civilisation de l’espace.
Enfin, d’autres éléments sont nettement énoncés à travers de simples dialogues ou bien de franches déclarations. C’est entre autres l’occasion de voir pour la première fois le terme de « newtype » qui, lui, sera expliqué en détail dans des tomes suivants mais dont il faut souligner au lecteur l’importance capitale afin qu’il y consacre toute son attention car c’est bien un des éléments majeurs de l’histoire : c’est en effet cette doctrine philosophique jadis échafaudée par Zeon Zum Daikun qui a servi de moyen idéologique à la famille Zabi pour précipiter la sphère humaine dans le terrifiant holocauste de la Guerre d’Un An ; les occasions ne manqueront pas d’y revenir. Notons également les propos de Ramba Ral à sa concubine Hamon quand il explique à cette dernière les motivations qui l’ont conduit à accepter cette mission de détruire le White Base et son prototype de Gundam : le personnage s’affirme ainsi, presque d’emblée, comme une antithèse de l’archétype du « méchant » tel qu’il existait à l’époque dans le genre mecha et dont le seul but était de fournir une raison pour poursuivre la série à travers des épisodes supplémentaires qui en fin de compte ne faisaient que raconter la même chose que les précédents, en simplifiant à peine ; mais si Ramba Ral n’est pas présenté comme un personnage torturé à proprement parler, on discerne bien les contradictions qui l’animent, conflits intérieurs issus d’un passé familial dont il ne porte pas la responsabilité mais dont il doit néanmoins assumer les conséquences, ne serait-ce que pour assurer la vie de ses hommes : on a vu des « méchants » plus simples que ça…
Finalement, ce tome est aussi – et surtout – l’occasion de rencontrer enfin le véritable orchestre de la Guerre d’Un An, un personnage dont le portrait rappellera vite aux férus d’Histoire les pires tyrans du passé, ce qui colle encore une fois à merveille au credo de réalisme propre à la franchise : Gihren Zabi nous fait ici une brillante démonstration de ses talents d’orateurs avec lesquels il a largement contribué à embrigader toute la population de Side 3 pour lui faire accepter d’abord que la République de Zeon devienne Principauté, et ensuite que seule la guerre libérerait les habitants de l’espace de l’oppression que lui faisait subir, depuis trop longtemps, l’élite des dirigeants de la Fédération restés bien confortablement sur Terre pendant que les colons mourraient en construisant de leurs mains la Nouvelle Frontière ; avec cet opportunisme malicieux qui le caractérise, il fait de son éloge funèbre à son frère Garma l’occasion d’un discours de propagande qui galvanisera le moral de toute la population et des soldats de Zeon afin de poursuivre l’effort de guerre en vue de « faire triompher la justice » : retransmis à la fois dans toutes les colonies et sur Terre, ce discours et l’ovation que lui fera son audience venue rendre hommage au fils cadet des Zabi terrifieront le jeune équipage du White Base qui, pour la première fois, verra de ses yeux toute la fureur dont est capable Zeon.
Les +
- des éléments majeurs sont révélés qui éclairent le lecteur sur les coulisses de l’univers et le caractère de certains acteurs principaux
- l’évolution des personnages majeurs, pourtant déjà bien marquée, se poursuit
- arrivée d’un personnage fondamental
Les -
- (néant)